La santé des SDF a mauvaise mine

L’accès aux soins pour les sans-abris en Belgique semble toujours aussi compliqué. Entre les droits bafoués, le suivi médical difficile et les inégalités sociales et de santé, ce n’est pas évident de s’y retrouver.

D’après une analyse vidéo de « Médecins du Monde Belgique », 93 % des personnes sans domiciles, sans papiers et toxicomanes n’ont pas d’accès aux soins. Et 7 sans-abris sur 10 n’ont pas de médecin généraliste.

En premier lieu, il y a un aspect important à prendre en compte, le sans-abri est-il informé de ses droits en matière d’accès aux soins ? Eh bien, tous les sans-abris ne le sont pas, car ils ne savent pas nécessairement à quels types d’accès, ils ont droits. C’est pour cela que les organismes d’aides qui comportent des assistants sociaux jouent un rôle majeur. Ceux-ci, les aident à ouvrir l’accès aux soins et à comprendre leur situation.

Le CPAS est souvent cité en termes d’aide mais bon nombre de conditions sont à remplir pour pouvoir y accèder. L’un des problèmes principaux est que chaque CPAS dépend d’une commune et fonctionne indépendamment et différemment des autres. Ensuite, le temps d’attente est long, car par manque de personnel, le traitement des dossiers n’est pas réalisé dans les délais prévus. Puis, une fois que l’aide médicale ou la carte médicale est accordée à la personne sans-abri, en fonction du CPAS, le type de couverture sanitaire est différente. Pour finir, la localisation pose un problème. Pour l’obtention de remboursement de soins de santé, la difficulté est de prouver que le sans-abri réside bien dans telle commune même s’il n’a pas d’habitation. Établir une place concrète où se retrouve la personne afin de savoir exactement à quel CPAS s’adresser demeure complexe. Madame Michelazzo, médecin chez Médecins du Monde assure que les services CPAS font de leur mieux afin de traiter chaque demande et restent disponibles, si besoin.

L’accueil

Il peut arriver dans certains cas, même s’ils sont rares, comme le démontre un témoignage paru lors d’une analyse de « Vivre Ensemble Éducation » que les sans-abris se voient refuser un accès aux soins dans les hopitaux à cause d’alcoolisme ou mauvaise hygiène. Cela se passe plus fréquemment dans les hôpitaux de type privés, car moins habitués à ce genre de public. C’est pour cette raison que le sans-abri est le plus souvent envoyé dans les hôpitaux publics. S’il se fait refuser d’un établissement, il peut aller dans un centre de consultations médicales généralistes. Si la personne a besoin d’être traitée de façon plus importante ou urgente, elle est obligatoirement redirigée vers des hôpitaux publics devant la prendre en charge.

« Les hopitaux publics ont le devoir de prendre en charge une personne sans-abri qui a besoin de soins urgemment. »

Maria Benedetta Michelazzo

Suivi médical complexe

Les sans-abris se retrouvent également face à un problème de taille qui est le suivi médical et la prise de traitements réguliers. Dans un premier temps, il peut y avoir une interruption nette d’un traitement. À certains moments, la personne sans-abri se retrouve sans couverture sanitaire car la carte médicale pour se rendre dans une pharmacie expire et le temps de la renouveler, elle est donc, momentanément sans traitement.

Par exemple, dans le cas d’un sans-abri ayant le diabète, la prise d’insuline fait partie intégrante de son traitement, mais pour la conserver, il faut un frigo, ce qu’il ne possède pas. Pour contrôler quotidiennement le taux de glycémie dans le sang, une série d’outils est nécessaire. Les centres d’aides peuvent leur fournir ces outils afin d’assurer leur traitement de façon régulière.

Le suivi médical des sans-abris sur la durée est compliqué. D’une part, car ils peuvent ne plus se rendre dans les organismes d’aides pour diverses raisons et donc ne plus pouvoir être suivi correctement. D’autre part, parce que les informations entre les différents professionnels de santé passent parfois de manière peu fluide. Si un individu s’est vu soigner à l’hôpital et ensuite dans un service de médecine générale, la difficulté de récupérer les dossiers de ces personnes est bien présente : au niveau des examens médicaux déjà effectués par le passé, des médicaments déjà administrés, des prises de sang déjà faites,…

« Nous faisons de notre mieux afin de garder contact avec nos patients, même si cela est compliqué »

Maria Benedetta Michelazzo

La politique a un rôle à jouer

Il y a une réelle corrélation entre les inégalités sociales et les inégalités d’accès à la santé au niveau de la pauvreté qui ne peut être niée. Ce lien n’est pas nécessairement pris en compte lors d’actions politiques pour les sans-abris menées dans le pays. Un rapport intersectoriel du conseil bruxellois paru en 2020 met en lumière ce problème. La discrimination à l’embauche, l’exclusion scolaire, le manque de logement et les logements à prix inaccessibles sont également des facteurs qui contribuent à la recrudescence des sans-abris. La prise en compte du contexte social et de la santé est donc essentielle si la prise en charge de la problématique globale du sans-abrisme doit être traitée et ce, de manière efficace. Madame Michelazzo signale d’ailleurs que tout ce qui peut être fait au niveau médical n’a pas vraiment de résultats sur le long terme si la partie sociale du problème n’est pas soignée à son tour.

« Il faut absolument soigner tous les aspects de la santé comme l’accès aux logements, à la sociabilité et à une bonne alimentation. »

Maria Benedetta Michelazzo

Dossier social électronique en discussion

Il y a énormément de discorde autour de ce sujet, c’est pour cette raison qu’il est toujours en discussion. Le but de ce dossier ? Recenser les informations et la situation des sans-abris en demande d’aide.

Alors pourquoi ce dossier sème-il autant de conflits ? Premièrement, il n’y a pas de demande concrète faite par les secteurs, car celui-ci va représenter un coût financier assez élevé ainsi qu’une demande de personnel plus importante. Ensuite, les arguments qui vont à l’encontre de ce dossier est qu’il existe déjà un dossier social mais établi uniquement par le CPAS, bien que tous les sans-abris ne soient pas affiliés à un centre public d’actions sociales en particulier. Également, ce dossier nuirait à la vie privée des sdf.

Les acteurs de terrain seraient plutôt enclins à vouloir collecter des données entièrement objectivables, ce qui exclurait les informations psycho-sociales et médicales.

Pour en savoir plus :

  • Un guide destiné aux personnes qui n’ont plus de toit ou qui sont en train de le perdre
  • Témoignage d’un ancien sans-abri qui raconte son premier jour dans la rue
  • Si vous voulez rejoindre une association

Romane De Simone

20 ans, étudiante en 1ère communication à l’ISFSC. Passionnée par l’art et le design.